L’impact de l’organisation de la Coupe du Monde sur l’attractivité des IDE et la croissance économique au Maroc
Rédigé par: EN-NMINEJ ILYAS Docteur En droit des affaires, faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Fès.
Abstract :
The organization of the 2030 FIFA World Cup offers Morocco a historic opportunity to enhance its economic attractiveness and international visibility. Co-hosted with Spain and Portugal, the event is expected to generate massive investments in both sports and non-sports infrastructure, strengthen the country’s image, and increase foreign investor confidence.
Anticipated outcomes include the creation of several hundred thousand jobs, the stimulation of the tourism sector, and a projected GDP growth of nearly 6% after the event. However, the success of this project depends on transparent governance, strategic planning, and its sustainable integration into national development policies.
Résumé :
L’organisation de la Coupe du Monde 2030 représente pour le Maroc une opportunité historique de renforcer son attractivité économique et son rayonnement international. Co-organisé avec l’Espagne et le Portugal, cet événement devrait générer des investissements massifs dans les infrastructures sportives et non sportives, améliorer l’image du pays et accroître la confiance des investisseurs étrangers.
Les retombées attendues concernent la création de plusieurs centaines de milliers d’emplois, la dynamisation du secteur touristique, ainsi qu’une croissance prévisionnelle du PIB de près de 6 % après l’événement. Toutefois, la réussite de ce projet repose sur une gouvernance transparente, une planification stratégique et une intégration durable dans les politiques nationales de développement.
Introduction
Depuis plusieurs décennies, les grands événements sportifs mondiaux à l’instar des Jeux olympiques ou de la Coupe du Monde de football se sont imposés comme des leviers stratégiques de développement économique, de diplomatie et de visibilité internationale.
Le Maroc, en tant que co-organisateur de la Coupe du Monde 2030 aux côtés de l’Espagne et du Portugal, se trouve face à une opportunité historique pour consolider sa position sur la scène mondiale, renforcer son attractivité pour les investissements directs étrangers (IDE) et stimuler sa croissance économique.
Cette candidature, saluée dans le discours royal du 3 octobre 2023 par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, s’inscrit dans une dynamique de coopération intercontinentale et de développement partagé.
Dès lors, il convient de s’interroger : dans quelle mesure l’organisation de la Coupe du Monde 2030 peut-elle constituer un levier stratégique pour renforcer l’attractivité des IDE et stimuler la croissance économique au Maroc ?
Nous examinerons, d’une part, les opportunités économiques et diplomatiques offertes par cet événement (I), puis nous analyserons les mécanismes de financement et de gouvernance mis en place afin d’assurer un impact durable (II).
I. Une opportunité stratégique pour dynamiser l’attractivité des IDE et la croissance économique
A. Des infrastructures sportives et non sportives modernisées
Le Maroc s’est engagé dans un vaste programme d’investissements, incluant la construction du stade de Benslimane (5 milliards de dirhams), la rénovation de six stades majeurs (Tanger, Rabat, Casablanca, Marrakech, Agadir, Fès) et la mise à niveau d’une soixantaine de centres d’entraînement.
Parallèlement, des projets de mobilité (extension du TGV, modernisation aéroportuaire et autoroutière, pôles multimodaux) viennent renforcer l’attractivité du territoire pour les investisseurs étrangers.
B. Un renforcement de l’image et du soft power
La Coupe du Monde constitue une vitrine mondiale. Elle contribue à la consolidation de la « marque Maroc », portée par la diplomatie sportive et le phénomène « Trend Maroc », qui valorise l’image du pays auprès des investisseurs.
Elle permet également d’affirmer une diplomatie proactive, notamment par la représentation cartographique du Sahara sur les supports officiels liés à l’événement.
C. Une dynamique économique créatrice d’emplois
Les prévisions estiment entre 200 000 et 300 000 emplois créés, touchant les secteurs de la construction, du tourisme, des transports et des services. Si certains postes demeurent temporaires, l’essor du tourisme et des services promet une pérennisation d’emplois qualifiés, favorisant l’insertion des jeunes.
D. Un impact durable sur le tourisme
Avec un objectif ambitieux d’attirer 17,5 millions de touristes d’ici 2026 et de générer plus de 120 milliards de dirhams de recettes, le Maroc place le tourisme au cœur de sa stratégie de croissance, et l’organisation de la Coupe du Monde 2030 constitue à cet égard une opportunité sans précédent pour renforcer la compétitivité du Royaume sur la scène internationale.
La visibilité mondiale de l’événement permettra non seulement de stimuler l’arrivée de visiteurs étrangers, mais aussi de diversifier les marchés émetteurs en ciblant, au-delà de l’Europe, de nouveaux bassins comme l’Amérique latine, l’Asie ou l’Afrique subsaharienne.
Par ailleurs, les retombées économiques dépasseront le secteur strictement touristique : l’augmentation prévue des flux de visiteurs, estimée à plus d’1,5 million de personnes supplémentaires, devrait générer entre 2 et 3 milliards de dollars de recettes additionnelles et avoir un effet multiplicateur sur les secteurs de l’hôtellerie, du transport, de la restauration, de l’artisanat et des loisirs.
En outre, la promotion internationale associée à la Coupe du Monde contribuera à accroître la notoriété des produits nationaux notamment agricoles, artisanaux et culturels favorisant ainsi les exportations et consolidant la place du Maroc comme une destination globale, conjuguant attractivité touristique, compétitivité économique et rayonnement culturel durable.
II. Gouvernance et financement de la Coupe du Monde : vers un impact économique durable
A. Les acteurs et mécanismes de financement
L’investissement total est estimé entre 15 et 20 milliards de dollars, dont la part marocaine atteindrait 5 à 6 milliards. Le financement repose sur un mix : budget de l’État (25 Mds DH), entreprises publiques (17 Mds DH), emprunts et aides internationales (10 Mds DH).
B. Une gouvernance axée sur la transparence
Sous l’impulsion royale, la gouvernance de l’organisation de la Coupe du Monde 2030 repose sur une coordination interinstitutionnelle étroite, impliquant l’État, les collectivités territoriales, les entreprises publiques et le secteur privé, afin d’assurer une planification cohérente et une répartition optimale des ressources.
Cette gouvernance se distingue par la mobilisation de financements innovants, associant budget de l’État, partenariats public-privé, emprunts extérieurs et instruments financiers dérivés, ce qui permet de diversifier les sources et de limiter la pression sur les finances publiques.
Une telle approche vise, d’une part, à garantir la transparence dans la gestion des fonds, en s’appuyant sur des mécanismes de contrôle et d’audit indépendants ; d’autre part, à favoriser la rationalisation des coûts par l’optimisation des investissements, la mutualisation des infrastructures et la réduction des dépenses superflues.
En outre, elle ambitionne de consolider la durabilité des retombées économiques, en veillant à ce que les projets réalisés – qu’ils soient sportifs, touristiques, énergétiques ou numériques – s’inscrivent dans une stratégie de long terme, contribuant à la compétitivité internationale du Maroc et au développement inclusif des territoires.
C. Un levier de croissance et de modernisation structurelle
Les estimations prévoient une hausse du PIB d’environ 6 % à l’issue de l’événement, ce qui témoigne de l’ampleur de l’impact macroéconomique attendu. Cette croissance ne saurait toutefois être réduite aux seuls investissements dans les infrastructures sportives et de transport : elle découle également d’une dynamique structurelle plus large. En effet, la Coupe du Monde 2030 agit comme un catalyseur pour des secteurs stratégiques.
D’abord, le domaine des télécommunications bénéficiera d’un essor considérable, notamment à travers l’accélération du déploiement de la 5G et l’extension des réseaux à haut débit. L’amélioration de la connectivité numérique favorisera non seulement l’organisation logistique de l’événement, mais renforcera aussi la compétitivité du Maroc dans les domaines du commerce électronique, des services financiers digitaux et de l’économie du savoir.
Ensuite, la transition énergétique constitue un autre axe majeur. L’augmentation des besoins en énergie liée à l’événement incite à diversifier les sources et à investir davantage dans les énergies renouvelables (solaire, éolien, hydrogène vert). Cette dynamique consolidera le rôle du Maroc comme hub régional de la transition énergétique et attirera de nouveaux partenariats technologiques et industriels.
Enfin, la régionalisation avancée sera renforcée par la répartition des projets sur l’ensemble du territoire. Les investissements liés à la Coupe du Monde profiteront non seulement aux grandes métropoles comme Casablanca, Rabat ou Marrakech, mais également à des villes secondaires appelées à accueillir des infrastructures de transport, d’hébergement ou de services. Cela contribuera à réduire les disparités régionales, à stimuler l’emploi local et à renforcer l’intégration territoriale dans la dynamique de croissance nationale.
Ainsi, au-delà de l’événement sportif, la Coupe du Monde 2030 s’inscrit comme un levier structurel de modernisation, capable de consolider la compétitivité du Maroc dans l’économie mondiale tout en favorisant un développement inclusif et durable.
Conclusion
L’organisation de la Coupe du Monde 2030 constitue pour le Maroc un tournant historique. En combinant investissements massifs, gouvernance transparente et stratégie d’attractivité internationale, le Royaume peut transformer cet événement en catalyseur de croissance inclusive et durable.
Toutefois, le succès dépendra de la maîtrise des défis logistiques, environnementaux et sécuritaires, ainsi que de la capacité à inscrire la Coupe du Monde dans une vision à long terme intégrant innovation, éducation et durabilité.